DECOUVRIR LE SENS PROFOND DE NOEL!

Publié le par Myriam

nativ_h.jpg

    

 

Nous sommes entrés dans la saison hivernale, et bientôt nous fêterons Noël. Cette fête chrétienne porteuse d'une haute symbolique humaine a perdu de son sens, devenant peu à peu, pour bien des gens, une banale fête  de la consommation, du moins pour  ceux et celles qui en ont encore les moyens financiers...Car la crise du chômage prive aujourd'hui un nombre grandissant de personnes de participer au rituel de la consommation.
Le temps de Noël peut aussi être l'occasion de découvrir le sens véritable, profond, de cette fête, une fête qui peut devenir un enrichissement et un bonheur tout autre,  une occasion de retourner aux sources initiales, pour y découvrir des valeurs bien plus importantes que celles de l'argent et de la consommation. Nous portons tous en nous, inconsciemment, un conviction profonde: le plus important dans la vie n'est pas ce que nous pouvons acheter, mais ce que nous pouvons acquérir en puisant dans nos ressources humaines personnelles qui sont d'une toute autre nature, d'une autre importance que l'argent. Les valeurs d'amour et d'humanité ne sont pas d'ordre mercantile, mais le résultat de notre capacité d'individu de comprendre, d'aider et de partager.
Faisons l'effort de relire les pages des évangiles qui nous relatent la véritable signification de Noël. Ces textes sont passionnants et vraiment extraordinaires si nous prenons la peine de les analyser en profondeur.
N'est-il pas curieux que les évangiles de Luc et de Matthieu nous présentent une nativité très différente ? Commençons par l'évangile de Luc. Dans la merveilleuse traduction d'André Chouraqui, nous lisons: "Et c'est, en ces jours, un édit de Caesar Augustus sort pour recenser tout l'univers. Ce recensement est le premier, Quirinius étant gouverneur de Syrie. Ils vont tous se faire inscrire, chacun dans sa ville. Joseph monte aussi de Galil, de la ville de Nasèrèt, vers Iehouda, vers la ville de David, appelée Béit Lèhèm. Il est de la maison de David et de son clan. Il se fait recenser avec Miriâm, sa fiancée, qui est enceinte. Et c'est, quand ils sont là, les jours de son enfantement se remplissent. Elle enfante son fils, son aîné. Elle l'emmaillote et le couche dans une mangeoire, car il n'y avait pas de place pour eux dans la salle." Cette traduction est bouleversante par sa simplicité et son évocation sobre qui touche le coeur. Le texte qui suit est comme une brise légère: "Des bergers étaient là, dans ce pays; ils vivaient aux champs, et gardaient, aux veilles de la nuit, leur troupeau." Puis l'évangile raconte l'apparition de l'ange, messager de Dieu qui annonce aux bergers la "bonne nouvelle": "Il est né pour vous aujourd'hui un sauveur. C'est le messie d'Adonai (Dieu), dans la ville de David. Tel est pour vous le signe: vous trouverez un nourrisson, emmailloté, couché dans une mangeoire." Le texte poursuit en narrant l'apparition d'une multitude d'anges qui louent Dieu en disant: "gloire à Dieu dans les hauteurs et paix sur terre aux hommes de bon gré!" Les bergers se rendent à Bethléhem et trouvent Miriam (Marie) et Joseph avec l'enfant couché dans la mangeoire.
L'évangile de Matthieu nous présente une évocation bien différente. Reprenons la traduction émouvante d'André Chouraqui: "L'enfantement de Iéshoua (Jésus), messie, c'est ainsi: Miriâm (Marie), sa mère, est fiancée à Iosseph (Joseph). Avant qu'ils se rencontrent, elle est trouvée l'ayant dans le ventre par le souffle sacré. Iosseph, son homme, est un juste. Ne désirant pas sa disgrâce, il se résout à la délier en secret. Dans cette perplexité, voici, un messager d'Adonai (Dieu) lui apparaît en rêve et dit: Iosseph bèn David, ne frémis pas de prendre avec toi Miriâm, ta femme. Oui, ce qui s'enfante en elle est du souffle sacré. Elle enfantera un fils. Crie son nom: Iéshoua (Jésus), parce qu'il sauvera son peuple de ses fautes." Un peu plus loin, nous lisons: "Iosseph se réveille du sommeil. Il fait selon ce que lui a ordonné le messager d'Adonai (Dieu) et prend avec lui sa femme. Il ne la pénètre pas jusqu'à ce qu'elle ait enfanté un fils. Il crie son nom: Iéshoua (Jésus)". Le texte qui suit: "Quand Iéshoua naît à Béit Lèhem en Iehouda (Bethléhem en Judée), dans les jours du roi Hèrodes, voici, des mages du levant arrivent à Ieroushalaîm (Jérusalem) et disent: Où est-il, le nouveau-né, le roi des Iehoudîm (Juifs)? Oui, nous avons vu son étoile au levant, et nous venons nous prosterner devant lui." Suit alors l'évocation du roi Hérode qui s'inquiète d'apprendre la naissance d'un messie et qui essaye de s'informer, par les mages, de l'endroit où se trouve l'enfant, dans l'intention de le tuer. Les mages suivent 'l'étoile' qui les mène à la maison où ils trouvent l'enfant. Le texte traduit par Chouraqui garde son charme tout particulier: "Et voici, l'étoile qu'ils avaient vue au levant devant eux. Elle vient et s'arrête au-dessus du lieu où se trouve le petit enfant. Ils voient l'étoile et se réjouissent d'une très grande joie. Ils viennent dans la maison et voient le petit enfant avec Miriâm, sa mère. Ils s'inclinent et se prosternent devant lui. Puis ils ouvrent leurs trésors. Ils lui offrent des présents d'or, d'oliban et de myrrhe. Eux-même sont avertis par un rêve de ne pas retourner chez Hérôdès. Ils se retirent par une autre route vers leur pays;" Le texte qui suit rapporte que Joseph, à son tour, est averti en songe, par un messager de Dieu qui l'avertit du danger qui menace le nouveau-né. Il fuit avec sa petite famille en Egypte. Hérode furieux, ordonne de tuer tous les enfants de moins de deux ans, c'est le "massacre des innocents". A la mort d'Hérode, un messager de Dieu informe Joseph que ce dernier est mort et qu'il peut retourner dans son pays. Se méfiant du fils d'Hérode qui prend la succession de son père, Joseph ne retourne pas à son ancienne résidence et s'installe à Nazareth en Galilée.
Nous sommes, à l'évidence, confrontés ici à deux narrations très différentes de la naissance de "Jésus". Si on lit attentivement les textes dans leur intégralité, cela est encore plus évident! Les théologiens chrétiens ne se sont guère intéressés à ces "différences", arguant que les narrations ne sont pas à prendre à la lettre et sont à la fois approximatifs, "poétiques" et complémentaires...Ce qui explique que la tradition des crèches de Noël, qui est tardive dans l'histoire de la chrétienté et qui remonte au temps de François d'Assise, présente une étable avec un boeuf et un âne (dont on ne trouve nulle trace dans la narration de Luc), comme décor de l'évènement. Les premiers visiteurs de l'évènement de la naissance sont les bergers, puis suivent les "rois mages"...On a donc fait un amalgame de deux narrations qui n'ont guère de concordance. C'était bien plus simple que de s'interroger sur les raisons et la signification des différences dans les deux récits. N'est-il pas curieux que les théologiens ne se soient pas intéressés davantage à ce mystère? Ou l'ont-ils fait, sans y trouver de solution, préférant alors ignorer ces différences?
Rudolf Steiner (1861-1925), le grand penseur et visionnaire, a, le premier, dans une série de 10 conférences tenues à Bâle, du 15 au 26 septembre 1909, abordé ce thème, en analysant en profondeur les textes des évangiles de Luc et de Matthieu. Ces textes sont tellement différents que R. Steiner parle de" deux enfants Jésus"... Il a, par la suite, encore tenu de nombreuses conférences sur ce sujet, en exposant les résultats de ses propres investigations spirituelles et ésotériques.  L'étude de ces textes est révélatrice de la profondeur et de l'étendu du travail de cet esprit exceptionnel. Pour tous ceux et celles qui sont en recherche, qui se posent des questions sur le sujet que nous avons abordé et bien d'autres encore, on ne peut que recommander vivement la lecture de ces textes.
Nous nous contenterons ici, de nous pencher sur le message de Noël dans son ensemble, pour essayer d'en tirer quelques enseignements simples et universels. La traduction d'André Chouraqui révèle le caractère bien particulier du style de narration de Luc et de Matthieu. On remarque immédiatement qu'il ne s'agit pas d'une évocation de type journalistique tel que nous la concevons de nos jours. Il s'agit plutôt d'un récit très épuré, une sorte de conte, relatant un évènement à la fois simple, mais troublant. Notre intellect n'y trouve pas son compte, mais notre coeur, s'il n'est pas étouffé par notre société matérialiste, peut s'émouvoir. Des images simples, mais belles, peuvent faire vibrer notre âme d'une manière inhabituelle: redevenir enfant pour s'étonner, se réjouir du merveilleux, se laisser bercer par la magie des images évoquées...Il faut dès lors, pour arriver à comprendre ce que les textes nous apprennent et saisir le sens des images proposées, ouvrir notre coeur.
L'évangile de Luc décrit un Noël populaire, fait pour les gens ordinaires, simples, riches en leur âme, remplis de la "bonne volonté" requise pour comprendre véritablement la proclamation joyeuse des messagers du ciel. Marie et Joseph quittent Nazareth en Galilée, pour aller se présenter au recensement à Bethléem. Les bergers bouleversés par la vision de l'ange divin annonciateur, portent en leur coeur la soif d'amour, de fraternité, de paix qui leur ouvre la route vers l'endroit où ils trouvent l'enfant couché dans "une mangeoire". La narration est simple, linéaire et n'évoque aucune adversité extérieure. L'enfant Jésus dans l'évangile de Luc, propose à l'humanité un chemin vers la paix universelle dans le monde, celui de la fraternité, de l'amour, du partage. C'est l'enseignement que le grand Bouddha avait déjà tenu à ses disciples au cinquième siècle avant notre ère! Ce même message est évoqué dans l'évangile de Luc. "Paix sur la terre aux hommes de bonne volonté!" L'enseignement de Bouddha et le "Noël" que raconte l'évangéliste Luc se rejoignent de par leur esprit d'appel à la fraternité, à la compassion, à la paix. Un tel message peut s'adresser à tout humain quelle que soit sa culture et répond à un besoin profond de tout être humain. Notre monde actuel est-il capable d'intégrer dans la société humaine un tel "Noël"?
L'évangile de Matthieu, tout en restant aussi "mythique" que celui de Luc, se passe dans un "décor" bien différent. Cette narration est plutôt "réaliste, terrestre". Nous apprenons, au début du récit, que Joseph qui n'a pas encore "connu" Marie, est paniqué quand elle lui dit qu'elle attend un enfant. Il veut se séparer discrètement de sa compagne, mais le messager de Dieu l'informe, pendant son sommeil, des intentions divines. Dès son réveil, il fait comme l'ange lui a prescrit et prend chez lui son épouse. Ils habitent alors dans une maison à Bethléhem en Judée. Ici aucune évocation d'un quelconque recensement...Matthieu rapporte la venue des "mages d'Orient" qui suivent "l'étoile" qui les guide et qui leur indiquera l'endroit exact où se trouve le nouveau-né. Dans cette narration, il est aussi question du roi Hérode qui apprend par les mages la naissance du "roi des juifs" et qui pense pouvoir se servir des mages, par ruse, pour trouver l'endroit où se trouve l'enfant, pour pouvoir l'éliminer. Il ordonnera, par la suite, en constatant que les mages ne lui ont pas fourni les renseignements requis, le massacre des enfants de bas âge, voulant ainsi s'assurer de l'élimination de ce Jésus "roi des juifs". Nous sommes ici dans un monde dramatique, plein de menaces, d'affrontements, de cruauté, bien loin de celui des pacifiques bergers, de l'harmonie des messagers du ciel, de leur visite paisible pour adorer l'enfant couché dans une mangeoire! Les visiteurs qui arrivent,guidés par "l'étoile", sont des mages venus "d'Orient", avec le statut tout particulier attaché à cette évocation. La tradition en a fait des "rois", pour signifier leur rang particulier et leur importance. En fait ces trois personnages mystérieux incarnent le savoir, la sagesse, les sciences que l'on peut acquérir et étendre sans cesse. Leurs cadeaux individuels représentent des symboles tout particuliers: l'or, l'oliban (l'encens) et la myrrhe. L'or représente les forces dont dispose la pensée humaine. L'encens représente la catharsis qui est le moyen, pour l'humain, de purifier son âme de ses entraves égoïstes afin qu'elle puisse accéder à la vérité. La myrrhe symbolise la force considérable de la volonté. Ces "mages" représentent donc, à travers les symboles attachés à leur offrande, des individualités qui possèdent un immense savoir, celui que l'on peut acquérir par les expériences au cours de vies terrestres, ils représentent l'élite parmi les "savants", les "scientifiques," à une époque de l'humanité où ce terme n'existe pas encore, dans l'acceptation actuelle. Ces mages "viennent d'orient", où les savoirs sont alors les plus poussés et on peut supposer que les trois personnalités représentent la synergie de ces savoirs: ils ont la connaissance non seulement de ce qui vit et existe sur terre, mais savent aussi "lire" dans le ciel, pour observer non seulement la voûte étoilée, mais aussi y déchiffrer les messages occultes qu'elle peut afficher, pour ceux qui sont capables de les déchiffrer. En se prosternant devant l'enfant, ils s'assujettissent humblement, en reconnaissant par leur geste, que leur savoir, certes grand, ne saurait se comparer à celui des puissances de l'univers, du divin, dont l'enfant incarne à la fois l'humilité et la grandeur. Cette "imagination de Noël" garde son sens initial aujourd'hui: tout savoir, tout spécialement celui dont s'enorgueillissent les scientifiques de tous bords, reste extrêmement limité en comparaison de "Celui" qui a su créer la terre et l'univers tout entier... Tout orgueil démesuré à ce sujet se révèle dès lors, comme du pur narcissisme et devient assez insignifiant sinon ridicule. Nulle intelligence humaine ne saurait être supérieure à celle qui a tracé les espaces que nous habitons et créée l'être humain. Ce dernier est le fruit de la terre le plus précieux et toute science qui, par ses applications, nuit à la véritable vocation humaine, est le contraire du "Noël" voulu par les mages.
L'évangile de Luc et de Matthieu illustrent donc des situations, des intentions bien différentes, mais complémentaires. D'une part un scénario qui veut toucher le coeur humain, pour l'humaniser davantage, inciter l'être humain à "recouvrer son innocence originelle", non pour devenir infantile mais pour réapprendre à s'étonner de la vie, développer l'intérêt pour les autres, pour mieux les comprendre, les aider, les aimer davantage. D'autre part, chez Matthieu, nous trouvons une incitation à dépasser la seule perception matérielle du monde et des êtres qui y vivent: la pensée humaine donne accès aux savoirs possibles sur notre terre. Cela est nécessaire à l'être humain pour progresser. Mais notre pensée doit s'exercer à aller plus loin que la réalité tangible, pour accéder aux réalités spirituelles qui fondent le monde matériel. Notre intelligence doit se mettre au service de l'humain, pour qu'il puisse se développer dans un contexte social incitant à la créativité et à la progression humaine. Elle doit se "prosterner" devant les exigences véritables de la nature humaine, pour en mesurer la grandeur et la vocation. Chaque être humain mérite de vivre, pour s'épanouir, pour développer ses propres talents. C'est en purifiant notre vie intérieure de nos égoïsmes, par une catharsis symbolisée par l'image de l'oliban, de l'encens, que nous aurons accès au mystère humain de "l'autre", pour mieux le servir et l'aimer. Pour cela, la force de la volonté personnelle, symbolisée par la myrrhe, sera sans cesse nécessaire.
Voilà des images de Noël qui sont bien loin de celles que nous présentent les médias de notre temps, qui ne cessent de vouloir nous suggérer que la fête de Noël ce ne sont que les lumières multicolores, les pères Noël et les paquets-cadeaux! Si notre imagination sur Noël se limite à ces stéréotypes de consommation, nous nous lasserons vite, parce que, en définitive, tous ces biens matériels, parfois enviables, souvent aussi inutiles, sont tout de même incapables, à long terme, de nous combler. La société de consommation a ses mérites, mais aussi ses limites. Si elle néglige le facteur humain, si elle tolère des injustices sociales, si elle n'apprend pas à partager les richesses et l'amour de la vie avec les autres, si elle oublie ceux qui sont dans la misère, elle ne fera que nourrir des rancoeurs qui finiront par s'affronter dans la violence et la souffrance. Prenons le temps de relire les textes qui sont à la source de la fête de Noël, pour en tirer un enseignement précieux et une force nouvelle. Les premiers chrétiens ne fêtaient pas Noël comme nous, car leur joie de Noël était vécue  dans leur âme, dans leur coeur. La volonté de nous ressourcer à partir de ces textes ne doit certes pas nous priver de fêter Noël selon nos traditions, ni nous empêcher de faire des cadeaux pour faire plaisir. Mais mieux comprendre le sens de Noël nous permettra d'avoir un regard nouveau sur cette fête et remplira notre âme d'une grande sérénité, pour apprendre à nous ouvrir aux autres, pour nous sentir solidaires et respectueux finalement de toute l'humanité. Les messages d'humanité que contiennent les évangiles de Luc et Matthieu ont donc un caractère universel: ils touchent tous les humains, quels que soit leur sexe, leur culture, leurs convictions politiques et spirituelles. Que Noël redevienne pour nous une véritable redécouverte, un émerveillement: une joie véritable, la fête de la grandeur de la dignité humaine, telle que l'illustrent magnifiquement les belles cantates de J.S. Bach! Noël reprend dès lors son sens véritable et devient alors un véritable message de joie, d'espérance et d'amour!

Publié dans Echange d'idées

Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :
Commenter cet article